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DOLMEN DE PASSEBONNEAU

 

Le dolmen de Passebonneau est situé dans un pré à vaches qui se trouve au bout du chemin à gauche, peu avant le village du même nom, en venant de Saint-Benoît sur la route de Cromac. Le champ appartient à M. Vincent, des Morins.

Il est de belle apparence et on peut même voir le sommet de la table depuis la route. Il est composé, pieds comme table, de granit blanc à gros grains qui vient probablement des environs immédiats, si on en croit les nombreux petits blocs de même roche qu'on y trouve ; cependant, aucun réel affleurement n'est visible aux alentours. Il est haut sur pieds et atteint environ 1,80 m à l'endroit le plus élevé; sa table en forme de cœur, très penchée d'un côté, mesure 2,80 m sur 2,20 m, 90 cm dans son épaisseur maximale, et ne pèse pas moins de 10 tonnes. Il est classé monument historique.

On peut considérer comme un miracle de la statique que ce dolmen soit encore debout; en effet, un des pieds s'est affaissé et la table a basculé de quelques 30 degrés, ne tenant plus à l'ensemble que sur trois pieds et par des points de contact de quelques centimètres carrés. Un quatrième pied est droit mais ne supporte rien, et le cinquième est couché.

Cela pourrait faire penser à une tentative de démolition volontaire qui aurait été arrêtée in extremis. Toutefois, la seule manière d'abattre un dolmen de cette taille est de tirer sur les pieds avec une corde et, dans ce cas, les pieds concernés seraient penchés vers l'extérieur. Or, l'un est affaissé parallèlement au bord de la table et l'autre est tombé vers l'intérieur.

Mon hypothèse est donc autre. La table pivote selon un axe passant par le premier et le troisième pied sur lesquels elle est stable, mais qui ont été placés trop en arrière de la table, ce qui amène son poids vers l'avant. Or, par là, il n'y a qu'un pied, choisi trop petit pour subir une telle charge et qui s'est donc enfoncé et incliné. Le pied couché est plus imposant et aurait mieux supporté la charge; le fait qu'il soit tombé avant l'autre me fait penser qu'il ne touchait pas à l'ensemble et qu'il s'agit de la "porte".

Il est à craindre que l'affaissement ne continue, d'ailleurs favorisé par le piétinement des vaches, et qu'un jour tout ne se retrouve par terre; un séisme de faible ampleur y suffirait. Il aurait pu tomber il y a des siècles, mais le hasard en a décidé autrement, et son architecte, s'il n'a pas été le meilleur de son époque, a été le plus chanceux.

Ce dolmen a été l'objet de soins humains, et c'est peut-être cet attachement qui l'a sauvé. Sur la partie la plus basse de la table on peut voir une petite croix gravée, et sur le pied couché des signes profondément entaillés et où on peut lire S I O ou 5 1 0. Il est évidement impossible de dire si ces deux gravures ont été faites en même temps. Un spécialiste consulté m'a dit que S I O n'avait pas de sens religieux connu, c'est pourquoi je penche personnellement pour la date 1510, le premier 1 ayant été effacé. 

 

MENHIR DE PEU-MARIN

 

Sur le premier chemin à droite en allant de Passebonneau à La Châtre, à gauche en haut de la côte, au lieu dit Peu-Marin, on peut voir une pierre de granit blanc, d'environ 90 cm de long ( je n'ai pas vu de combien elle est enfoncée dans le sol ), penchée vers la gauche d'environ 30 degrés, pointue de forme. Sur cette pierre est taillée une grande croix en relief de 5 cm d'épaisseur, et le sommet, artificiellement aplani en un cercle grossier de 20 cm de diamètre, présente en son centre une cavité conique de 6 cm de diamètre et 8 cm de profondeur, probablement destinée à recevoir des fleurs ou des cierges. Cette pierre évoque un menhir et elle est réputée comme tel dans les environs, mais rien ne prouve qu'elle en soit un. Ce qui est certain, c'est que sur place on trouve du gneiss et surtout de l'amphibolite - qui fait la réputation du lieu - et que de tels blocs de granit ne se trouvent qu'à 150 mètres de là dans le cours de l'Anglin, ce qui me fait penser que cette pierre a été transportée.

 

MENHIR DES RANDES

 

En allant de Passebonneau à Chaillac, au carrefour dit "La Croix des Randes", au dessus du village des Randes, se trouve une pierre de granit à-peu-près parallélépipédique, dressée sur un socle et manifestement retaillée, portant une petite croix gravée dans sa partie supérieure.

La partie dressée fait 1,30 m de haut, sur 34 cm de largeur et 38 cm d'épaisseur. Le sommet, plus pointu, recèle une cavité carrée d'un côté et arrondie de l'autre, d'environ 12 cm sur 13 cm et 10 cm de profondeur, destinée, comme au Peu-Marin, à recevoir des objets de culte. Cette colonne est posée sur un socle de granit de 60 cm sur 65 cm, avec une quinzaine de centimètres hors du sol, et l'ensemble est consolidé par un deuxième socle, en ciment, posé sur le premier autour de la colonne.

Comme il n'est pas dans la tradition chrétienne occidentale d'élever des pierres, celles portant des croix sont généralement des monuments anciens, et on peut donc raisonnablement penser que cette pierre a bien été un menhir. Tout comme au Peu-Marin, des blocs de granit semblables se trouvent dans l'Anglin tout proche.

Après avoir été là des siècles durant, il était tombé, et il n'a été exhumé et relevé que récemment.

 

 

Ces trois mégalithes sont regroupés autour du village de Passebonneau, et le fait qu'ils portent des gravures de l'ère chrétienne est unique dans la région. Pour moi, cela signifie que les gens du coin ont été, au cours des siècles, suffisamment attachés à leurs pierres traditionnelles pour qu'il ait été impossible de les supprimer purement et simplement. Par ailleurs, il me semble que pour qu'un tel monument résiste au temps - surtout quand il est de petite taille - il faut qu'il y ait une tradition précise et persistante qui y soit attachée. Par l'adjonction d'une croix, le curé effectuait à la fois une rupture formelle avec le paganisme, et une continuité avec l'aspect sacré du lieu.